Arbitrage et conciliation dans l'Islam médiéval et moderne
- Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée
La justice en Islam est souvent associée au personnage du cadi, juge nommé par le pouvoir. L’État n’eut cependant jamais le monopole de la résolution des conflits. L’arbitre et le médiateur proposaient deux alternatives possibles, fondées sur le consensus des parties. Tandis que le premier, doté d’un rôle décisionnel, pouvait rendre une sentence généralement considérée comme exécutoire, le second orchestrait un processus de négociation se concluant par un accord à l’amiable. Face à des modes d’adjudication visant à déterminer un vainqueur et un perdant, la conciliation était tenue en haute estime par les juristes comme par les justiciables. La recherche d’un moyen terme permettait non seulement à chacun des adversaires de garder la face, mais servait aussi à préserver l’apparence d’une communauté musulmane unie.
Les dix contributions à ce dossier thématique explorent le fonctionnement de l’arbitrage et de la conciliation dans divers contextes, maghrébins et moyen-orientaux, depuis l’apparition de l’Islam jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Dans le cadre de litiges aux fondements juridiques, ces deux procédés pouvaient soit offrir une alternative à la justice du pouvoir, soit s’y articuler pour assouplir la prise de décision et l’adapter aux réalités sociales. Au-delà de cette complexe articulation entre institutions judiciaires officielles et privées, la conciliation fut aussi un outil essentiel de gestion des rivalités politiques, tout particulièrement dans le milieu de la cour.
L’image idéale de consensus associée aux procédures de conciliation ne doit cependant pas occulter des stratégies peu avouables par les acteurs eux-mêmes. C’est que la transaction permettait, aussi, de contourner la loi islamique, parfois au détriment de l’équité. Cette livraison de la REMMM invite ainsi à une lecture dynamique des conflits et de leurs résolutions en rapport avec leurs contextes historiques.
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