Le juge administratif, juge du référé-suspension
- Recherches Administratives
Le premier quart du XXIe est l’âge d’or des procédures administratives des référés. La procédure du référé-suspension de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative en est la plus importante sur le terrain pratique. Le mécanisme faisant, depuis 2000, l’objet de profondes mutations est, dans l’ensemble, cohérent.
L’étude a pour but de voir si les nouvelles prérogatives subtiles et redoutables dont le juge du référé-suspension dispose désormais l’ont amené à respecter la nature ou le particularisme de son office : l’urgence dans l’apparence. Il semble en réalité que l’urgence et l’apparence soient intimement liées. Or, il ressort de l’œuvre jurisprudentielle que ces deux volets de la mission du juge du référé soient quelque peu en décalage : alors que dans l’urgence le juge répond le plus souvent présent, de sérieux doutes subsistent quant à l’apparence.
D’emblée, il est important de préciser que la crise d’identité dont le juge administratif soufrait a disparu. L’efficacité est devenue le noyau dur de sa fonction. Ensuite, le changement d’état d’esprit et d’attitude du juge est tangible. Par son mode de fonctionnement, sa créativité et sa préoccupation des effets de ses interventions, le juge a fait preuve non seulement de la nécessité de sa fonction mais aussi de son utilité. Ce faisant, il a gagné de la crédibilité et de la légitimité, ce qui a renforcé son statut, que ce soit au niveau national ou européen. Au fond, la protection provisoire des administrés occupe, de plus en plus, le cœur du dispositif de la procédure de référé.
Malgré la performance du juge du référé-suspension, le mécanisme de la protection provisoire n’est pas exemplaire. Le bilan jurisprudentiel laisse perplexe et ce, à plusieurs niveaux : le rôle de l’équilibre que le juge du référé est censé défendre est fragilement assuré ; l’équité procédurale n’est pas tout à fait garantie ; l’abandon du préjugement du fond de l’affaire est incomplet ; les positions prétoriennes sont parfois ambigües, voire incohérentes. Pour y remédier, il ne faudrait plus que l’apparence, bénéficiant d’un poids excessif dans le raisonnement du juge, prenne le pas sur l’urgence. Une meilleure prise des nécessités de l’urgence exige une jurisprudence plus équilibrée.
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