Le théâtre pense, certes, mais quoi, comment et où ?

Le lecteur trouvera ici une étude singulière de l’événement théâtral. Une manière de repenser le théâtre qui procède, disons-le, d’une irritation, peut-être superflue, peut-être en partie injuste, éprouvée envers une pensée d’Alain Badiou qui, dans un petit texte de 1995, repris un peu plus tard dans le Petit manuel d’inesthétique (Seuil, 1998), développe, ou plutôt aligne, onze « Thèses sur le théâtre ». Texte qui comprime l’événement théâtral et se lit, in fine, comme le miroir du Pont d’Avignon de Régis Debray. Ce que l’on serait tenté d’appeler des Manifestes esthético-politiques d’auteurs qui se fondent, sur la récurrence d’un universalisme et d’un essentialisme, d’une posture morale, d’une pensée de la typification, de la complémentation, une opposition entre les arts…etc.
Or, l’événement théâtral, pour autant qu’il peut être l’objet des penseurs du théâtre, peut aussi être observé pour ce qu’il expose : un théâtre qui pense. D’où le titre de ce recueil Le théâtre pense, certes (nous le savons, heureusement, depuis longtemps), mais quoi, comment et où ? qui nous enjoint, tout d’abord, à aller au théâtre, à y retourner, à l’éprouver de l’intérieur pour savoir comment il pense, ce qu’il pense, et où. C’est une telle interrogation que nous avons voulu proposer aux intervenants de ce volume qui formulent ici nombre de propositions liées à quelques accointances. Regards de chercheurs européens et brésiliens ; regards de spectateurs, cet ouvrage collectif d’études s’affranchit des pensées monologiques pour créer un espace dialectique articulé à l’expérience de la scène théâtrale.